© Cour de Cassation / SDE
Cour de
Cassation Chambre commerciale
Audience publique du 28 février 1995 |
Rejet. | N° de
pourvoi : 94-12108 Publié au bulletin
Président :
M. Bézard . Rapporteur : M. Rémery. Avocat général : M.
de Gouttes. Avocats : M. Boullez, la SCP Ancel et
Couturier-Heller.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Sur les
trois moyens, pris en leurs diverses branches, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 janvier
1994), que les époux Planel ont vendu à M. Hauff un immeuble pour un
prix dont une partie était due sous forme d'une rente viagère
payable mensuellement le 3 de chaque mois jusqu'au décès du conjoint
survivant ; que, dans l'acte de vente, il était stipulé qu'à défaut
du règlement d'une seule échéance à sa date, la vente serait résolue
de plein droit un mois après un commandement de payer resté
infructueux ; que M. Hauff ayant été mis en redressement puis en
liquidation judiciaires par des jugements des 4 et 18 février 1987,
Mme Planel a adressé le 2 mars 1987 au liquidateur de la procédure
collective une déclaration de créance précisant que M. Hauff restait
débiteur envers elle de la somme de 3 875 francs, représentant la
mensualité du 3 février 1987 ainsi que de frais de renouvellement
d'inscriptions hypothécaires ; que, par des commandements de payer
des 23 juillet et 25 août 1987 visant l'application de la clause
résolutoire, Mme Planel a ensuite réclamé des arrérages échus
postérieurement à l'ouverture de la procédure collective ; qu'après
avoir payé avec retard les causes de ces commandements, le
liquidateur a été autorisé, par ordonnance du juge-commissaire, à
vendre l'immeuble par voie de saisie immobilière ; qu'au cours des
poursuites, Mme Planel a saisi le Tribunal d'un incident, en
soutenant que, par suite du défaut de paiement dans les délais des
arrérages de la rente, la clause résolutoire s'était trouvée acquise
et que l'immeuble était rentré dans son patrimoine ;
Attendu que Mme Planel reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa
demande en distraction de saisie et déclaré sa créance éteinte au
titre des arrérages à échoir alors, selon le pourvoi, d'une part,
que l'obligation faite au créancier du débiteur en redressement
judiciaire d'avoir à déclarer sa créance ne concerne, aux termes de
l'article 51 de la loi du 25 janvier 1985, que le montant de la
créance due au jour du jugement, les sommes à échoir n'étant
mentionnées qu'à titre indicatif ; que la cour d'appel, qui
considère que la créance d'arrérages à échoir de la rente viagère a
été éteinte pour n'avoir pas été mentionnée dans la déclaration de
créance, bien que ces arrérages ne fussent pas dus au jour du
jugement d'ouverture, a violé, par fausse application, les
dispositions de l'article 51 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors,
d'autre part, que l'effet extinctif des dispositions de l'article 51
de la loi du 25 janvier 1985 ne concerne que les créances dues au
jour du jugement d'ouverture ; que la cour d'appel qui considère que
la créance d'arrérages de rente viagère à échoir postérieurement au
jugement d'ouverture a été éteinte faute de déclaration, a violé,
par fausse application, les dispositions de l'article 51 de la loi
du 25 janvier 1985 ; alors, en outre, que " l'administrateur " a
opté pour la continuation du contrat de rente viagère dès lors
qu'assigné en paiement de ladite rente pour la période postérieure
au jugement d'ouverture, il a procédé au règlement des arrérages et
sollicité des délais qui lui ont été refusés par un jugement du
tribunal d'instance de Digne du 17 décembre 1987, et qu'ainsi "
l'administrateur " ne pouvait opposer un défaut de production des
créances de rente viagère pour la période postérieure au jugement
d'ouverture ; alors, au surplus, que la renonciation ne se présume
pas et doit résulter d'actes positifs non équivoques ; qu'en
considérant que Mme Planel avait implicitement renoncé au bénéfice
de la clause résolutoire au prétexte qu'elle aurait accepté sans
réserve le règlement d'arrérages, la cour d'appel a méconnu ensemble
les dispositions des articles 1134 et 1273 du Code civil ; alors, de
surcroît, que l'acte de vente du 3 septembre 1976 comportait une "
condition " résolutoire ainsi rédigée : " A défaut de paiement à son
échéance d'un seul terme des arrérages de la rente constituée, la
présente vente sera résiliée de plein droit, si bon semble aux
vendeurs, un mois après un simple commandement de payer resté
infructueux et contenant déclaration par les vendeurs d'user du
bénéfice de la présente clause " ; que la cour d'appel qui constate
que le liquidateur n'a réglé les causes des commandements des 23
juillet et 25 août 1987 qu'avec un retard de 4 mois et qui refuse de
faire application de la clause précitée a méconnu la loi du contrat,
en violation des dispositions de l'article 1134 du Code civil ; et
alors, enfin, que dans la déclaration de créance du 2 mars 1987,
irréprochable au regard des dispositions des articles 50 et 51 de la
loi du 25 janvier 1985, Mme Planel avait mentionné qu'elle était
créancière de M. Hauff d'une rente viagère payable par mensualités
de 3 875 francs indexés, de sorte qu'en affirmant que les arrérages
de la rente n'étaient pas mentionnés, la cour d'appel a dénaturé la
déclaration de créance précitée ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte de la
combinaison des articles 47, alinéa 1er, et 37, alinéa 1er, de la
loi du 25 janvier 1985 qu'un créancier dont la créance a son origine
antérieurement au jugement d'ouverture ne peut exercer d'action en
résolution ou tendant à faire constater l'acquisition d'une clause
résolutoire pour défaut de paiement d'une somme d'argent que s'il
s'agit de sommes échues après le jugement d'ouverture du
redressement judiciaire du débiteur et qui sont dues en vertu d'un
contrat en cours au sens de l'article 37 de la loi précitée ; que la
créance de Mme Planel pour les arrérages de la rente échus
postérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire
de M. Hauff ayant son origine dans le contrat de vente conclu
antérieurement et celui-ci n'étant plus en cours au sens du texte
précité, dès lors que le transfert de la propriété de l'immeuble
vendu s'était, en l'espèce, réalisé dès la signature de l'acte de
vente, la résolution du contrat de vente pour non-paiement
d'arrérages à échoir ne pouvait qu'être écartée, peu important le
paiement de certains arrérages par le liquidateur ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel, après avoir
relevé, sans la dénaturer, que la déclaration de créance de Mme
Planel, qui se bornait à demander paiement de la mensualité du 3
février 1987, sans indiquer, conformément aux dispositions de
l'article 51, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985, les sommes à
échoir et la date de leurs échéances, n'exprimait pas, de façon non
équivoque, sa volonté de réclamer les arrérages à échoir de la
rente, en a déduit exactement que la créance à ce titre était
éteinte ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses
branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin 1995 IV N° 59
p. 56
Décision attaquée : Cour
d'appel d'Aix-en-Provence, 1994-01-20 Titrages et résumés 1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE
(loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires -
Créanciers du débiteur - Action individuelle - Suspension - Portée -
Action en résolution d'une vente - Défaut de paiement du prix -
Sommes échues après l'ouverture de la procédure collective - Créance
ayant son origine dans l'acte de vente antérieur à l'ouverture de la
procédure.
1° Il résulte de la combinaison des articles 47,
alinéa 1er, et 37, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985 qu'un
créancier dont la créance a son origine antérieurement au jugement
d'ouverture, ne peut exercer d'action en résolution ou tendant à
faire constater l'acquisition d'une clause résolutoire pour défaut
de paiement d'une somme d'argent que s'il s'agit de sommes échues
après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire du débiteur
et qui sont dues en vertu d'un contrat en cours au sens de l'article
37 de la loi précitée.
En conséquence, la créance au titre des arrérages d'une rente
échus postérieurement au jugement d'ouverture du redressement
judiciaire du débirentier ayant son origine dans un contrat de vente
conclu antérieurement et celui-ci n'étant plus en cours au sens du
texte précité, dès lors que le transfert de la propriété de
l'immeuble vendu s'était, en l'espèce, réalisé dès la signature de
l'acte de vente, la résolution du contrat de vente pour non-paiement
d'arrérages à échoir doit être écartée.
2° ENTREPRISE EN
DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation
judiciaires - Créances - Déclaration - Forme - Remise au
représentant des créanciers d'une déclaration précise -
Nécessité
2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier
1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Créances -
Déclaration - Rente viagère - Réclamation sans équivoque des
arrérages à échoir - Nécessité.
2° Ayant relevé que la
déclaration de créance du crédirentier n'indiquait pas, conformément
aux dispositions de l'article 51, alinéa 1er, de la loi du 25
janvier 1985, les sommes à échoir et la date de leurs échéances, et
n'exprimait pas, de façon non équivoque, sa volonté de réclamer les
arrérages à échoir de la rente, une cour d'appel en déduit
exactement que la créance à ce titre était éteinte.
2°
ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et
liquidation judiciaires - Créances - Déclaration - Forme - Remise au
représentant des créanciers d'une déclaration précise -
Nécessité
Précédents jurisprudentiels :
A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1991-04-09,
Bulletin 1991, IV, n° 127, p. 91 (cassation). A RAPPROCHER : (2°).
Chambre commerciale, 1991-02-12, Bulletin 1991, IV, n° 66, p. 45
(rejet).
Lois citées : 1° :. Loi
85-98 1985-01-25 art. 47 al. 1, art. 37 al. 1. 2° :. Loi 85-98
1985-01-25 art. 51 al. 1.
|